Protection animale, le western…. Vraiment ?
Quand la ministre du Bien-être animal discrédite son secteur et multiplie les attaques envers les principales associations de protection animale du pays !
Les propos tenus très récemment dans la presse par Madame Céline Tellier, ministre du Bien-être animal, ont choqué le milieu, c’est peu dire.
Après les avoirs qualifiés de cow-boys il y a quelques mois, voici maintenant que la ministre affirme que les acteurs de la protection animale adoptent une attitude violente et résume notre militantisme à une dimension émotionnelle.
Céline Tellier sait-elle vraiment de qui elle parle avec un tel mépris ?
Lettre ouverte…
Madame la ministre, qui êtes-vous donc pour vous permettre de tenir des propos insultants à notre égard alors que vous nous connaissez à peine ? Qui êtes-vous donc pour afficher un tel mépris, sans précédent depuis plus de 20 ans, à l’égard de notre travail associatif ?
Avant de nous juger de manière aussi radicale, vous êtes-vous vraiment intéressée à ce que nous faisons ? À ce que nous représentons ? À ce que nous obtenons ?
Alors qu’au sein de votre cabinet, le département « Bien-être animal » a été réduit comme peau de chagrin (une seule collaboratrice pour cette cellule), sur le terrain ce sont plusieurs centaines de salariés qui travaillent dans les refuges professionnels. Ces derniers sont secondés par des milliers de bénévoles. Il faut bien cela pour accueillir, héberger et soigner des dizaines de milliers d’animaux chaque année et pour défendre leurs intérêts. Dans les refuges, le travail ne s’arrête jamais, 7 jours sur 7, 365 jours par an, y compris en période de pandémie.
Alors qui est réellement au service des animaux en Wallonie ?
Refuges, mais pas que…
Aujourd’hui, votre administration et vous-même (ce que vous appelez « redéfinir le rôle de chacun ») voudriez que nous nous contentions d’être de simples fourrières. C’est faire fi de nos rôles essentiels que sont le militantisme, l’information, la communication et la pédagogie. Pour le public, nous sommes la « passerelle » de confiance pour atteindre l’autorité.
N’étant pas dépendant d’un financement public, notre secteur se doit d’être également un lanceur d’alerte. Notre droit à la critique sur les manquements de votre administration et votre absence d’enthousiasme politique ne peut être entravé et ne peut faire l’objet de pressions, ce serait indigne de notre démocratie et du mandat qui vous a été confié.
Si aujourd’hui, la Wallonie dispose d’une législation très aboutie, elle le doit à une excellente collaboration entre vos prédécesseurs et les associations de protection animale. Si aujourd’hui, le bien-être animal est une compétence ministérielle et devient un enjeu de société à part entière, c’est grâce à la mobilisation de ces mêmes associations pendant plusieurs décennies. Précisons encore que si certaines affaires aboutissent en justice, elles le sont le plus souvent suite à l’acharnement des associations de protection animale.
Diviser pour mieux régner
Vos paroles sont nos seulement infondées, blessantes et insultantes, mais elles atteignent un niveau d’écoeurement lorsque vous osez affirmer que les refuges se tirent dans les pattes. Ce coup, porté clairement en dessous de la ceinture, est révélateur qu’au-delà du mépris il y a également cette volonté de nous dévaloriser auprès du grand public. Pire, il témoigne d’une méconnaissance flagrante de notre secteur.
Les refuges pour animaux et associations n’ont jamais autant collaboré qu’aujourd’hui et ont, ces dernières années, réussi à se fédérer. Ne vous en déplaise, mais vous avez hérité d’un secteur uni comme il ne l’a jamais été, notamment sous l’égide d’une fédération - devenue la plus importante du pays - et dont plusieurs projets ont été soutenus financièrement par votre prédécesseur.
Et financièrement, justement…
Pour équilibrer vos propos inacceptables, précisons que vous avez également déclaré que les refuges doivent être soutenus et remerciés. C’est sympa, mais là encore, on peut se poser la question de votre vision de la réalité et de votre connaissance du terrain. Pour la prise en charge au quotidien de ces milliers d’animaux, le budget annuel des plus importants refuges de Wallonie dépasse le million d’euros. Il n’est donc pas anormal de s’étonner de vous voir vous glorifier de leur avoir octroyé une aumône de 2.500 euros comme « prime covid ». Pour rappel, votre prédécesseur avait soutenu les principaux refuges wallons à hauteur de 24.000 euros…. et nous n’étions pas en situation de crise !
En Wallonie, les refuges peuvent heureusement compter sur des dizaines de milliers de donateurs dont l’indéfectible soutien envers la cause animale n’a d’égal que leur empathie envers les êtres que nous sauvons. Sans eux, les animaux abandonnés, errants et saisis, qu’ils soient chiens, bovins, chevaux ou chats resteraient livrés à leur triste sort, sans eux, les avancées législatives améliorant le sort de milliers d’animaux n’auraient jamais vu le jour. En méprisant ainsi le travail des refuges et des associations, vous insultez aussi toutes ces personnes qui les soutiennent.
Une guerre des refuges salvatrice
Vous prétendez ouvertement et sans retenue que nous voulons nous substituer aux organes de contrôles tels que la police ou vos inspecteurs fonctionnaires de la Région wallonne. Nous attendons toujours que vous nous apportiez la moindre preuve d’un quelconque comportement qui validerait vos propos.
Par ces déclarations, vous revêtez le costume de porte-parole de votre administration qui, depuis le coup de gueule des refuges à son égard, est totalement restée dans le déni tout en essayant d’affaiblir les outils qui ont été mis en place par vos prédécesseurs afin d’assurer une meilleure gestion des cas d’animaux maltraités.
Rappelons au passage que la gestion calamiteuse des plaintes pour maltraitance animale n’a pas été épinglée que par les associations. On ne peut oublier la perquisition menée au sein de l’UBEA par une juge d’instruction pour soupçons de corruption ni la sortie très remarquée du bourgmestre de Lessines qui demandait la dissolution du service pour incompétence. À cela s’ajoutent les innombrables doléances dont les citoyens – quand il ne s’agit pas des autorités locales – nous font part.
À ce propos, vous nous avez reçus (la seule et unique fois) en octobre 2019. Vous nous aviez alors promis de réunir tout le monde autour de la table, au plus tard en janvier 2020. Non seulement vous n’avez pas tenu promesse, mais six mois plus tard vous avez botté en touche en « refilant » le problème à un bureau d’avocats en vue d’une médiation. Un futur beau parapluie politique pour vous et une porte définitivement fermée pour nous alors, qu’une fois encore, vos prédécesseurs étaient accessibles à tout moment et nous recevaient plusieurs fois par an.
Une provocation permanente
Indépendamment de ce qui précède, votre politique, ou plutôt votre absence de politique en faveur de la protection des animaux – au contraire de vos homologues flamands et bruxellois - pose question depuis le début de votre mandat, il y a dix-huit mois.
Pour ne citer que quelques exemples, on retiendra particulièrement :
• Votre obsession d’interdire aux refuges wallons de rouvrir après la première vague « covid » alors que l’autorité fédérale autorisait les parcs animaliers et zoos à reprendre leurs activités. Il aura fallu la médiatisation de notre mécontentement pour pouvoir poursuivre enfin notre activité essentielle.
• Votre soutien aux inspecteurs de l’UBEA qui ont cautionné un abattage illégal de moutons alors que vous étiez interpellée au parlement sur le sujet.
• Votre gel de la réforme annoncée sur l’expérimentation animale
• Votre enthousiasme face à une peine administrative très laxiste administrée à un véritable bourreau d’animaux.
• Votre façon de vous défaire sans honte du sujet du gavage.
• Votre absence d’avancées incompréhensible concernant les animaleries, les colliers électriques ou encore le broyage des poussins.
Changement de cap immédiat
Face à votre retranchement derrière votre administration et des consultants externes, face à votre attitude insultante à l’égard du secteur de la protection et de la défense animale – les acteurs sociétaux de terrain qui se dévouent pour la cause dont vous avez les attributions à part entière - face à votre absence de vision et d’ambition politique en matière de bien-être animal, le secteur est plus que jamais dans l’attente d’un sursaut, ou plutôt d’un réveil, après des mois de quasi léthargie, d’immobilisme et d’irrespect.
Allons-nous devoir nous mettre en grève ? Consacrer nos forces à nous mobiliser pour avoir enfin un(e) ministre du Bien-être animal en Wallonie ?
Aujourd’hui, nous n’avons plus d’autre choix que d’interpeller le Gouvernement et les députés wallons face à cette situation aussi inédite qu’intenable, en espérant qu’ils puissent nous aider à ouvrir, enfin, les portes de votre cabinet, pour entamer avec nous un dialogue direct, comme le ferait n’importe quel autre ministre soucieux des compétences dont il a la charge !
Le secteur majoritairement insatisfait de Céline TELLIER
Dans un récent sondage réalisé auprès des associations et refuges wallons – à l’initiative de l’UWPA :
- 89% des associations wallonnes de protection animale jugent l’action et la politique de la ministre du Bien-être animale insatisfaisante ou très insatisfaisante
- 87% d’entre eux jugent l’action de l’administration de la ministre du Bien-être animal insatisfaisante ou très insatisfaisante.
Sondage réalisé auprès des refuges agrées de Wallonie – janvier 2021 - 78 répondants.